Aphrodite

Déesse de l’amour et figure féministe


Tu sais il existe une déesse sortant de l'écume

Elle aime sourire

Elle est si belle que les genoux se ploient

Si belle que le temps s'arrête

Les dieux et les hommes en salivent

Les déesses en sont jalouses

Et certaines femmes rêvent

Rêvent de sa beauté

Rêvent de sa splendeur

Et les autres se meurent

En hurlement de douleurs

Tu sais bien qu'à certaines, elle a brûlé le coeur

Une femme, une déesse tempêtueuse et douce

Dont les formes font chavirer

Ceux qui se perdent dans les filets d'or, qu'elle tend

C'est la mère de l'amour

Qui sait faire rire le poète

Qui sait comment le faire écrire mille vers

Le faire pleurer de mille larmes

Elle est là sur mon bureau

Elle règne

Maîtresse de tous les coeurs

Sur un royaume de mots et de caresses

Illustration par Maya Scotton

Qui est Aphrodite, d’où vient-elle ?

Pour montrer la figure féministe que représente cette déesse, empreinte de mille facettes, il faut bien commencer par dire qui elle est et d’où elle vient.

Aphrodite déesse de l'amour, de la séduction, du désir, du plaisir et de la beauté est une figure de la femme, et par ses mythes, de l'amour.

Le premier à nous conter la naissance d'Aphrodite est Homère qui dans l'Iliade nous dit que la déesse de l'amour est née d'un des nombreux adultères de Zeus. Si son père est Zeus, sa mère serait Dione, fille d'Océan.

Mais ce n'est pas la seule histoire, le seul mythe sur la naissance d'Aphrodite. Un autre, fait d’Aphrodite la fille d’Ouranos, qui lorsque son fils, Kronos, découpe ses testicules et les jette dans la mer, l’ensemence, donnant naissance à Aphrodite, sortant de l’écume.

  1. De la déesse Antique à la figure Féministe

J’aurais pu alors parler de la Déesse antique, amoureuse et vengeresse, j’aurais pu conter ses histoires. Mais allons plus loin que la figure antique, cherchons à travers elle, une figure de femme d’aujourd’hui, une figure de celle qui nous montre, nous, femmes véritables et puissante.

A)    Les amours d’Aphrodite

Je ne pouvais pas ne pas parler d’Aphrodite sans parler du prisme de ses amours et de ses aventures, les conquêtes d’Aphrodite ne sont pas aussi grandes que celles de Zeus, mais elle reste une des déesses du panthéon gréco-romain qui en a le plus. Et rien que de cet état de fait, on peut déjà faire ressortir un message du féminisme d’aujourd’hui : une femme a le droit au nombre de conquêtes qu’elle veut, ça ne fait pas d’elle une traînée ou d’autres mots peu reluisants qui peuplent le vocabulaire des insultes françaises. Aphrodite a un corps, elle en joue, elle en profite, elle vit et personne ne peut la juger pour ça.

Puisque nous parlons de la manière qu’a Aphrodite d’appréhender son corps, je vais aborder une part de son mythe pour nuancer mon propos. Aphrodite comme nous l’avons vu plus tôt est née, dans toutes les versions, dans la mer (sa mère est soit une fille d’océan, soit la mer elle-même), donc, dans le lac où elle arriva sur terre, chaque fois qu’elle vient s’y baigner, elle redevient vierge. Ce mythe met alors en place une femme qui cherche à retrouver la virginité, symbole et construction forte des sociétés patriarcales, qui amène un contrôle sur la femme, mais on peut aussi y voir un symbole féministe car si la virginité est le parfait symbole du contrôle des hommes, c’est la manière qu’a Aphrodite de la retrouver qui nous la montre, femme défiante. Femme qui se lave des mains et des carresses des hommes, ainsi que d’une femme qui se réaproprie son corps pour le refaire pleinement sien.

Je trouve personnellement qu’il est très difficile d’aborder les mythes autour de l’amour ou de la sexualité, pour les mettre comme modèles de notre réalité, ça serait en soi préférer une facette de ces mythes à une autre (soit pour voir la vie en noir, soit pour la voir en rose). C’est pour ça que je n'aborderai pas cette catégorie plus en détail, mais j’utiliserai quand-même certains de ces mythes pour en expliquer d'autres ou pour expliquer une vision plus générale de la société Olympienne.

B)    La Femme Vengeresse ou la Prisonnière d’une société patriarcale

Pour bien comprendre cette catégorie il faut remettre en perspective l’arrivée d’Aphrodite sur l’Olympe.

La première apparition de la déesse nous montre une femme qui dès le jour de sa naissance se retrouve sortant des eaux, le Port Altier. On nous la décrit pleine de beauté et de prestance, plus tard nous la voyons arriver sur l'Olympe en rendant désirants et jaloux dieux et déesses. Par sa beauté, elle amène une grande rivalité (elle est une des déesses qui se bat pour la pomme d'or et qui gagnante va provoquer la guerre de Troie), cette rivalité lui donne un mariage d'ennui et la sulfureuse luxure.

Sulfureuse luxure que l’on peut voir notamment dans le mythe amoureux qui la lie avec Arès, le dieu de la guerre violente. Les deux amants essayent de faire en sorte que leur relation reste discrète car extra conjugale, mais rien ne peut se cacher aux yeux d'Hélios le soleil, qui prévient aussitôt le mari bafoué. Héphaistos piège alors sa femme et son demi-frère dans un filet d'or, laissant les amants nus à la vue des dieux (les déesses ayant plus de respect et de pudeur). Cette relation et surtout sa découverte amène la figure de la femme vengeresse envers les descendantes du Soleil.

Le soleil a lui-même des relations tumultueuses, mais ses descendantes se retrouvent dans les tourbillons de l'amour tragique, qui les fera prendre le chemin du dolor, tourner au niveau du furor, puis tout droit jusqu'au nefas. J’aurais pu alors prendre bien des exemples de figures tragiques : Pasiphaé, Phèdre, Ariane, Circé, Médée, …

Prenons alors comme exemple le cas de deux sœurs, Phèdre et Ariane, descendantes du soleil, femmes de Thésée. Je commencerai par Ariane pour donner un ordre chronologique. Ariane, fille de Minos et de Pasiphaé (fille du soleil), va aider Thésée à détruire le Minotaure (son demi-frère). Elle fait en sorte que Thésée ne se perde pas dans le labyrinthe en lui donnant le fameux fils d’Ariane. C’est une jeune fille intelligente, qui a su poser les bonnes questions et en sortir les bonnes réponses, sans elle Thésée ne serait pas le grand héros que l’on connaît. Pourtant celui-ci va l’abandonner sur une île, la jeune femme étant alors triste va soit se suicider en se jettant dans la mer, soit Dionysos vient la consoler et finit par l’épouser.

De l’autre côté il y a Phèdre, toujours fille de Minos et Pasiphaé, durant la guerre des Amazones un de ses frères va combattre aux côtés de Thésée, et proposer la main de Phèdre, quand bien même Thésée a abandonné son autre sœur sur une île. Phèdre et Thésée vont donc se marier, mais par une double vengeance d’Aphrodite (sur Phèdre et Hippolyte), l’épouse va tomber amoureuse de son beau-fils. L’amour que ressent la fille de Minos n’est pas partagé par Hippolyte, délaissée elle va donc écrire une lettre accusant le jeune homme de l’avoir violée et se suicide.

Mais d’autres ont pu avoir le malheur de rencontrer la déesse jalouse et vengeresse. On peut alors voir l’histoire d’Eros et Psyché et bien d’autres encore (les filles du roi de Chypre refusent de l'honorer, elle les force à se prostituer, Eos la déesse de l’aurore qu’elle pousse à tomber amoureuse d’humains, les femmes de Lemnos qu’elle afflige d’une odeur épouvantable, …).

Peut-on réellement se contenter de voir Aphrodite comme une déesse jalouse ?

Eh bien je ne pense pas, et je trouve que ce serait plutôt réducteur. Si je demandais à n’importe qui de me dire les titres de déesse d’Aphrodite, on me répondrait qu’elle est la déesse de l’amour et de la beauté. La beauté est une caractéristique qui revient constamment pour qualifier cette déesse, elle est belle, elle est envoutante. On la définit à travers son corps et la façon qu’elle a de l’utiliser, parce que c’est la vision des dieux Olympien qui dès qu’ils la voient veulent l’avoir dans leurs couches, parce qu’elle est belle.

Alors pourquoi ne pas voir tout ça comme une construction patriarcale ?

On la définit comme la beauté même, on ne la regarde que par ce prisme là, alors il paraît un peu plus logique qu’elle s’attaque à tous ceux ou celles qui cherchent à lui enlever sa seule caractéristique.

Mais aujourd’hui ?

Eh bien on continue de voir Aphrodite par cette femme belle à en mourir, par exemple les filles d’Aphrodite dans Percy Jackson ont elles aussi comme caractéristique la beauté. Quand on parle d’Aphrodite ou de Vénus qui a plus passé la barrière aujourd’hui, on voit la Vénus de Milo et ce corps à demi-nu, symbole de beauté et d’amour. Certes de nos jours il y a quand même certains qui cherchent à montrer Aphrodite différemment, par exemple dans le webtoon Tradition de L’OLympus, la déesse de l’amour est une femme indépendante, une mère aimante qui n’hésite pas à se battre pour ses enfants et pour d’autres déesses, ainsi qu’une femme amoureuse qui cherche quelqu’un de bien pour elle et qui ne se laisse pas manipuler par la société patriarcale qui est la sienne. Un autre exemple dans la chanson Dark Horse de Katy Perry, celle-ci met en place la déesse de l’amour dans une demande claire : ​​« Make me your Aphrodite / Make me your one and only / But don’t make me your enemy », Katy Perry demande ici à son amant de la choisir pleinement elle, ou comme Aphrodite elle pourrait devenir son ennemi.

Je pense qu’il est temps de voir plus loin que la figure antique d’Aphrodite, qu’il est temps de la voir comme la Reine qu’elle est, une femme pleine et entière, qui vit sa vie comme elle l’entend.

Tu sais il existe une déesse sortant de l'écume

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